The Great Depression
commisaire Romain Dauriac
Jean Marie Appriou
Sylvie Auvray
Julie Beaufils
Jason Benson
Camille Blatrix
Morgan Courtois
Andrew J Greene
Sam Lipp
Robert Malaval
David Rappeneau
Chloe Siebert
« Il est difficile de remédier à notre propre tristesse parce que nous sommes complices. Il est difficile de remédier à celle des autres parce que nous en sommes captifs » disait Jean Baudrillard. Du point de vue de cette sentence, la dépression est traitée de manière « complice » par une génération d’artistes, complice elle aussi. Ensemble ils constituent une « esthétique de la dépression ». Les artistes sélectionnés se sont appuyés sur ce thème afin de, pourquoi pas, s’exprimer sur des caractères « objectifs » insoupçonnés : de la trajectoire solaire des objets, du statut de marchandise à leur statut d’œuvres, de leur nécessité d’être fétichisés pour devenir cette marchandise absolue, de leurs affects et de leurs sentiments…
La dépression est ici une attitude solidaire et sa représentation mélancolique est son salut.
Dans l’exposition « The Great Depression », entre autres, se trouvent un lit dortoir, un livre au sol ouvert à une page précise : Celle d’un homme photographié aux alentours de 1930 vêtu d’une chemise blanche bouffante et plissée; Un costume de Comme des garçons de 1995 dont la collection entière a été accusée d’inciter à la haine. Sur les murs est accroché un assemblage d’objets évoquant des œuvres d’art. Voire le contraire, des œuvres d’art évoquant des objets…
Ici, c’est un système des objets qui se met en place. Comme une société d’objets permettant l’échange symbolique entre les œuvres de 12 artistes. L’exposition devient le lieu d’un duel inhérent à l’objet, celui de sa fonction qui s’oppose à son pouvoir de séduction. En explorant la dépression à la fois comme un concept intimiste, une béance intérieure, et comme une projection collective, l’exposition dresse une mise en scène nostalgique où chacun des objets se meut sans cesse entre hybridation matérielle, ready-mades fonctionnel, manipulation d’affects, ou simple autoportrait critique.
L’accrochage prend volontairement des allures domestiques, celles d’une chambre d’adolescent, ou d’une cellule de prison pour confronter le rôle traditionnel de l'artiste et de la galerie mais aussi du commissaire d’exposition vis à vis de la galerie. La galerie, en permettant l’expression du dilemme, n’est plus seulement un lieu d’exposition mais aussi de collision, lieu de distorsion.
« L’objet joue son rôle dramatique comme un acteur à part entière en ce qu’il déjoue toute simple fonctionnalité ». Ici, l’objet sacrifie son pouvoir producteur pour décupler sa puissance de séduction.
- Romain Dauriac